Colette… 1929 ! Je me souviens…

C’était l’année de mes 6 ans… il y a bien longtemps…

J’avais un frère, Yves, d’un an plus âgé que moi. Nous faisions tout ensemble : bêtises ou câlins !

Le soir de mon anniversaire, (déjà fêté par toute la famille à midi), ma grand-mère, que nous appelions « Mémé », m’avait demandé si je voulais quelque chose de spécial pour dîner (nous dînions avant les grandes personnes) : « Je voudrais des œufs avec des beaux chapeaux ! » J’avais déjà du en parler car aussitôt j’entendis Félicie, la bonne de ma grand-mère, crier dans la cuisine : « Madame ! ça bout l’eau ! » C’était l’eau pour cuire les œufs…

Bien installés à la grande table de la salle à manger, une serviette blanche autour du cou, nous attendions avec impatience l’arrivée de Félicie, porteuse d’un immense plateau : dans leurs coquetiers en porcelaine, ornés de leurs chapeaux aux couleurs vives tricotés par Mémé, nos deux œufs étaient les rois de la fête ! Les mouillettes, petits bâtons de pain grillé recouverts d’une épaisse couche de beurre normand, le coupe-œuf à tête de coq, les petites cuillères jaunes en os, l’odeur du bon café au lait : tout était prêt pour moi, petite fille de 6 ans émerveillée…

« Merci petit Jésus » avait dit mon frère Yves à la fin du festin, « et donnez s’il vous plaît du pain à ceux qui n’en ont pas. »

 

Colette Le Buf,

un peu plus de 90 ans plus tard… à Lyon le 15 mai 2019